PROJET ÉCOLE DU LOUVRE 2021-2022

L’ÉCOLE DU LOUVRE, AUJOURD’HUI ET DEMAIN

PAR CLAIRE BARBILLON, DIRECTRICE DE L’ÉCOLE DU LOUVRE

Claire Barbillon, est une historienne de l’art française. Spécialiste de la sculpture de la seconde moitié du XIXe siècle et d’historiographie, elle est directrice de l’École du Louvre depuis décembre 2017 et la première femme à occuper ce poste.

La crise sanitaire, qui a affecté toute la communauté universitaire en France, en Europe et à l’échelle de la planète, a eu paradoxalement quelques conséquences positives à l’École du Louvre. En effet, elle a posé, non sans brutalité, la question de l’enseignement à distance, des outils numériques nécessaires et, d’une manière plus approfondie, la question des atouts et des risques portés par un campus numérique, eu égard à la singularité du modèle pédagogique de cet établissement.

Une pédagogie du regard, de la mise en contact directe avec les objets et les œuvres, notamment traduite par le fait que toutes les séances de travaux dirigés ont lieu dans les musées, dans les monuments historiques, au cœur des collections, est et doit demeurer la colonne vertébrale d’un établissement unique en son genre. Parallèlement, la rencontre vivante et régulière de professionnels des musées et du patrimoine, enseignant au plus près de leur pratique professionnelle, fonde l’originalité de l’École du Louvre.

Mais le campus numérique, bâti dans l’urgence pour pallier les confinements successifs, ouvre des portes qu’il convient d’explorer pour moderniser une pédagogie ancrée dans la tradition de 140 ans d’enseignement. Il peut permettre non seulement de toucher de nouveaux publics auditeurs, aux périphéries des habitués des amphithéâtres du Louvre, mais aussi d’enrichir par une palette d’outils et de documents visuels et textuels les cours professés en présence. Il peut développer de nouvelles pistes pédagogiques, comme celle de la pédagogie inversée, mais aussi diversifier les modes d’apprentissages et d’évaluation, par la mise en œuvre d’exercices renouvelant, par exemple, les dispositifs académiques tels que la dissertation. Le projet original de pédagogie modernisée sur lequel travaillent les équipes de l’École du Louvre doit concilier le respect des principes fondamentaux et fondateurs qui assurent l’irréductibilité du modèle proposé par l’École du Louvre, consubstantielle aux musées et au patrimoine, et l’ouverture à une pédagogie ouverte sur les méthodes du XXIe siècle.

2021 aura été marquée, à l’École du Louvre, par deux profondes nouveautés. Tout d’abord, à la rentrée 2021, l’ouverture d’une Maison des élèves, destinée à procurer aux plus jeunes, aux plus éloignés géographiquement et aux plus modestes des élèves un lieu de vie exceptionnel, situé au cœur de Paris, à 15 mn à pied du Louvre. Puis, à la fin de la même année, les travaux menés à l’intérieur de l’École, poursuivis grâce à un très généreux mécénat pour réaménager la cafétéria, plus grande et plus conviviale, la bibliothèque, entièrement réorganisée avec 50% de places de lecteurs supplémentaires et un accès libre à l’ensemble des ouvrages, la création d’un Centre de recherche enfin, pour développer et valoriser la recherche conduite au sein de l’établissement. 2022 permettra la mise en œuvre d’une politique favorisant la jeune recherche et les ouvertures internationales.

L’École construit actuellement deux maquettes de nouveaux diplômes d’établissement de niveau post-master pour renforcer son dispositif de formation. Le premier sanctionnera une première année de recherche approfondie, posant le fondement d’un projet doctoral. Cette formation, d’une durée d’une année académique s’adressera aux titulaires d’un Master 2 en histoire de l’art, archéologie ou muséologie qui envisagent de poursuivre une thèse, en troisième cycle à l’École du Louvre ou en doctorat en co-encadrement avec une des 23 universités partenaires de l’établissement. Elle poursuivra trois objectifs. Tout d’abord, renforcer l’agilité de l’étudiant dans l’environnement de la recherche, en particulier dans le monde des musées et du patrimoine, dans la maîtrise des sources et des ressources (archives, bibliothèques, centres de documentation des musées et des établissements patrimoniaux…). Puis, préciser un sujet de recherche pertinent, en évaluant son opportunité, sa faisabilité dans la durée des trois ans prévue pour le doctorat. Élaborer les grandes lignes de sa problématique (enjeux, contexte, analyse critique). Enfin, consolider des méthodes de travail, individuelles et collectives, par une offre de séminaires, d’ateliers et de rencontres régulières et évaluées par des crédits ECTS.

Le second diplôme est conçu comme un post-master en muséologie internationale. Le développement des études muséales dans de nombreux pays ainsi que les fréquentes contributions des sociologues de la culture interrogent les professionnels de musées dont les méthodes de travail évoluent aussi vite que les enjeux politiques et sociétaux des établissements dans lesquels ils travaillent. L’École du Louvre, qui enseigne la muséologie depuis près d’un siècle, entend proposer à des étudiants avancés ou à de jeunes professionnels, français et étrangers, de bénéficier d’une approche comparatiste et des réflexions suscitées par les expériences les plus récentes et les plus diverses comme celle du Louvre Abu-Dhabi ou du projet du musée-mémorial du terrorisme. Cette formation sera entièrement dispensée en anglais, dans un format mixte « présentiel/distanciel » qui bénéficiera des avancées de son campus numérique.

L’École du Louvre poursuit aussi sa politique de diffusion culturelle en proposant à un public toujours plus large des cours de découverte ou d’approfondissement de l’histoire des arts dans des domaines variés. Le grand projet de la rentrée 2022 sera un cours d’initiation à l’histoire mondiale de l’architecture, élaboré en partenariat avec la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. C’est dans les locaux de ce partenaire, au Trocadéro, que seront programmés les cours en présentiel ; ils feront aussi l’objet d’une diffusion numérique et permettront une sensibilisation aux problématiques de l’architecture depuis ses premiers balbutiements jusqu’à la période toute contemporaine, en ne négligeant aucune région du monde.

Le développement de l’École du Louvre hors les murs et à l’international suppose une croissance parallèle de ses ressources propres, ce qui rend chaque jour plus fondamental le soutien que lui apportent ses mécènes. Le Fonds de dotation qui a été créé l’été 2020 est un vecteur fondamental de ce soutien, et l’année 2022 doit permettre une croissance significative de ce précieux outil.

LE PROJET « ÉCOLE DU LOUVRE 2021-2022 »

PAR CLAIRE BARBILLON, DIRECTRICE DE L’ÉCOLE DU LOUVRE

Pourquoi de grands travaux à l’École du Louvre ?

Si l’École bénéficie de locaux exceptionnels, réalisés en 1998 sous la direction d’Antoine Stinco dans le cadre du projet Grand Louvre, prolongés en 2017 avec le réaménagement du grand amphithéâtre Rohan (Etienne Dufaÿ), de nouveaux et impérieux besoins se sont faits sentir. Des besoins liés à la croissance même de l’École, aux évolutions pédagogiques, aux transformations des pratiques étudiantes, au déploiement de la recherche et au développement continu des technologies numériques dans les domaines de l’enseignement et de la bibliothéconomie.

C’est fort de ces constats que le projet « ÉCOLE DU LOUVRE 2021-2022 » s’est constitué, avec le réaménagement de la bibliothèque et des services connexes, la création d’un centre de recherche et la rénovation de la cafétéria.

Une nouvelle bibliothèque ?

La bibliothèque de l’École du Louvre, installée dans son niveau bas, a été conçue comme une traditionnelle bibliothèque d’étude et de recherche à la fin du siècle dernier et doit être repensée comme un complexe d’étude et de recherche contemporain au cœur de l’École et de sa pédagogie. Chacun sait, en commençant des études à l’École du Louvre, qu’il va fréquenter les salles de cours et celles des musées. L’aller et retour entre les deux est notre « ADN ». Mais la bibliothèque est en fait le troisième lieu fondamental de la vie d’un élève de l’École, c’est plus qu’un passage obligé, c’est le lieu de l’autonomie intellectuelle, enrichissant l’approche sensible des œuvres par les lectures et les recherches qui permettent de comprendre en profondeur ce que l’on voit, de compléter les cours, les travaux-dirigés, les séminaires…

Mais aujourd’hui, une bibliothèque, n’est plus seulement un endroit où l’on lit. C’est à la fois encore tout à fait cela et beaucoup plus. Les bibliothèques actuelles, dans les contextes universitaires internationaux, doivent offrir des espaces de consultation multimédia, un accès libre aux livres, des outils de recherche digitaux dédiés, la possibilité de travailler à plusieurs de s’isoler… le tout dans des espaces ergonomiques, esthétiques et écoresponsables. C’est le projet de l’École du Louvre.

Prolongement de la restructuration des espaces documentaires, le réaménagement des services documentaire et informatique a été également intégré dans le programme des travaux pour leur donner les moyens de leur développement dans des espaces adaptés.

Un centre de recherche à l’École du Louvre ?

La recherche est indissociable de l’enseignement. Tout établissement d’enseignement supérieur les relie, et ma conviction intime, moi qui ai été longtemps enseignante-chercheuse, est que l’on ne donne jamais un meilleur cours que lorsqu’il est issu de la recherche que l’on conduit parallèlement. Mon prédécesseur, Philippe Durey, a eu la conviction qu’il fallait renforcer la visibilité de la recherche au sein de l’École, une recherche spécifique conduite au plus près des collections de musée, des biographies d’objets, de la muséologie… Il a créé une équipe de recherche qui s’est développée, non seulement en animant des projets de recherche, avec de nombreux partenaires, mais en accompagnant les doctorants, par des ateliers méthodologiques, des séminaires d’actualité, du suivi individuel… Un nouveau pas est donc aujourd’hui franchi avec la création d’un véritable Centre de recherche, ses bureaux et sa capacité d’accueil de chercheurs étrangers, pour une dynamique supplémentaire au développement des projets !

Une cafétéria

Enfin, pas de vie d’une communauté, d’élèves, d’auditeurs, d’enseignants et de chercheurs sans rencontres informelles, et pas de lieu plus adapté, pour cela, qu’une cafétéria ! La nôtre est très fréquentée, très appréciée, mais nous considérions que son aménagement pouvait être amélioré. Certes, nous ne la transformerons jamais, pour des raisons de place, en un espace de véritable restauration, mais l’objectif d’en faire un « tiers lieu » original, ouvert sur de nombreux échanges et usages alternatifs.

Et comment financer un tel projet ?

Un tel projet n’aurait pu voir le jour sans le soutien d’un mécène.

Ainsi dans cet ambitieux programme de travaux, le réaménagement de la bibliothèque, des services documentaire et informatique, et la création du Centre de recherche, ont été rendus possible grâce à M. Majid Boustany, fondateur et président de la Francis Bacon MB Art Foundation, avec le plus important soutien jamais alloué à une institution d’enseignement du ministère de la Culture.

Un soutien actif, engagé, qui trouve aujourd’hui un nouveau et exceptionnel prolongement avec le don par notre mécène de deux œuvres d’Antony Gormley Witness VII et Witness VIII, sculptures installées au cœur de la bibliothèque, du grand chevalet ayant appartenu à Francis Bacon, provenant de son atelier parisien et positionné dans le vestibule de la bibliothèque et d’une photographie originale de Jesse A. Fernandez (Francis Bacon dans son atelier de 7 Reece Mews, Londres 1977)  qui marquera l’entrée du nouveau Centre de recherche.

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